VISION #36 - Denis Dailleux

 

C’est à l’agence de photographes VU’, au mois de septembre 2021, que je rencontre Denis Dailleux pour la première fois. Je viens d’y commencer un stage, la photographie est nouvelle pour moi. Et je ne le sais pas encore, mais je m’apprête à découvrir l’univers incroyablement tendre, subtil, atemporel, de ce photographe qui aime les gens et sublime les corps. Lors de nos rendez-vous de travail à l’agence VU’, il me confie son histoire, ses voyages, ses doutes, et son rapport intime, quasi viscéral, à la photographie. Il parle longuement, doucement, digresse souvent, et moi j’écris. Une relation d’écoute et de bienveillance mutuelle se tisse progressivement. Pour ce podcast, c’est à peu près le même exercice, devenu assez naturel entre nous. Il me reçoit chez lui un soir de printemps, dans sa jolie maison de Pierrefitte-sur-Seine. Timide et généreux, il y cultive les fleurs comme il photographie les gens : avec délicatesse, humilité et exigence. 

 
Photo : Denis Dailleux / VU',  Egypte, Le Caire, 2004 - Anater, banlieue nord du Caire. Enfant au bord du Nil, le jour de la fête de Sham el Nessim (la fête du printemps). Première photo décrite.
 
 

Chaque vision est singulière, porteuse de sens et de changement. Le but de ce format est de rassembler de nombreux artistes et que chacun nous délivre sa vision et son expérience de la photographie.

 
 

Cet épisode a été réalisé en partenariat avec Adobe France.
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Portrait de Denis Dailleux en Egypte
Denis Dailleux, Le Caire, Egypte
Photos : Denis Dailleux / VU', Le Caire, Égypte
 
 

Né en 1958 dans une famille d'agriculteurs en Anjou, Denis comprend très vite qu’il n’exercera pas le métier de ses parents et de ses grands-parents. Après une formation horticole dans un lycée professionnel, il part s’installer à Paris. Il y travaille d’abord comme fleuriste, en se formant en parallèle à la photographie. Les temps sont durs, il doute, mais persévère. Par chance, le service photo d’un journal finit par lui proposer des commandes et son travail commence à être remarqué. Ayant grandi dans un milieu modeste, il photographie majoritairement et de manière spontanée des personnes issues des classes populaires, comme en résonance à sa propre histoire. Sa grande-tante Juliette et les habitants de son village ont d’ailleurs été les premiers sujets de ses images. 

 
 
 
Denis Dailleux, enfant de la série Persan-Baumont
 
Denis Dailleux, enfant de la série Persan-Baumont
 

Sensible, Denis Dailleux l’est à tout ce qui l’entoure. Et c’est sans doute cette curiosité naturelle pour les autres, cet état constant d’émerveillement, qui l’ont amené à la photographie documentaire. Il observe et déclenche intuitivement, frappé par la beauté fragile d’un moment, d’une lumière, d’un lieu, mais surtout des personnes qui habitent le décor. Le portrait, qu’il privilégie comme mode de figuration depuis les débuts, illustre cette passion qu’il a pour les gens. Esthète envers et contre tout, le photographe revient souvent plusieurs fois au même endroit pour reprendre une image dont il n’est pas totalement satisfait. Changer le cadre, la posture du modèle, la disposition des objets, saisir une meilleure lumière, et  recommencer inlassablement jusqu’à atteindre une certaine perfection. Mais toujours avec pudeur, et patience aussi.

 
 
Photos : plus haut - Denis Dailleux / VU', Persan-Baumont, 1987-1992 et ici - Le Caire, Égypte 
 

De même que le moyen format impose une certaine lenteur de la prise de vue, son travail s’est toujours construit sur le long terme, initié par des rencontres et des relations humaines. Les deux pays au cœur de son travail, l’Egypte et le Ghana, sont des lieux avec lesquels il entretient des liens intimes - en particulier Le Caire, où il est d’abord parti vivre par amour. C’est le début d'une longue histoire avec cette ville et ses habitants, et plus largement avec la société égyptienne, dont il a saisi le portrait intime, singulier pendant près de trente ans.  La famille, la figure maternelle, l’enfance sont des thématiques qui traversent tout son travail, à Persant-Beaumont en France, en Egypte bien sûr, ainsi qu’au Ghana.  En ce moment-même, il séjourne dans son village natal d’Anjou pour revenir sur les traces du monde agricole de son enfance. Il mène ce projet documentaire dans le cadre de la commande photographique du Ministère de la culture, pour documenter cet univers professionnel où les tabous autour de la difficulté et la fragilité l’ont profondément marqué. 

 
 
 
 

Dans ce podcast, Denis Dailleux se confie. Il commence par son parcours initial - son enfance, ses études, son arrivée à Paris et ses débuts en tant que fleuriste. Puis, on s’immisce assez rapidement dans son univers photographique. Denis nous parle longuement de son projet en Égypte et des sous-séries qui en découle, notamment Egypt, Mother and Son, une série sensible qui nous emmène dans l’intimité de familles égyptiennes, et qui nous parle de la relation entre fils (ici bodybuildés, en l’occurrence) et mère. Denis évoque également son rapport au doute, notamment en photo. Il mentionne sa manière de tisser des relations avec ses modèles et l’importance de la mise en scène dans son travail. On ne vous en dit pas plus et on vous laisse découvrir ce magnifique podcast, sous fond sonore d’artistes égyptiens du label Habibi Funk. Bonne écoute.

 
 
Photos : plus haut - Denis Dailleux / VU', Egypt, Mother and Son et ici - Égypte, Le Caire, 1994, Mahmoud à Saqqara
 
 

« J’ai fait des photos pour sauver ma peau. »

– Denis Dailleux

 
 
Egypte, Alexandrie, 2005 - Dans la gare
Photos : DDenis Dailleux / VU', Égypte, Le Caire, 1994
 

Pour aller plus loin :

Richard Avedon, Irving Penn, Diane Arbus, Paul Strand, Robert Mapplethorpe.

Crédits :

Un texte écrit par Lily Lajeunesse, podcast réalisé par Aliocha Boi et Lily Lajeunesse, produit par Noyau.studio, monté et mixé par Alexis Chapuis et mis en musique par Habibi Funk. Les titres utilisés sont : Hamid El Shaeri - Ayonha, Hamid El Shaeri - Maktoub Aleina, Hamid El Shaeri - Dari Demou'ek, Magdy El Hussainy - Music De Carneval.

Liens :

Agence VU’
denisdailleux.com
Instagram

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